Au cours de ces dernières années, l’administration fiscale a mis à la disposition de ses agents des bases de données, et des outils de data-mining permettant le traitement et le croisement de grandes masses d’informations. Ces traitements permettent de produire des listes d’entreprises avec une évaluation du risque par dossier, et de déclencher le cas échéant des actions : enquête, contrôle, suspension du numéro de TVA intracommunautaire… Quels sont les principaux points de vérification lors d'un contrôle fiscal ?
Dans ce cadre, le Fichier des Écritures Comptables (FEC) est un outil essentiel du contrôle fiscal, car il permet à l’administration de réaliser des contrôles automatisés sur la totalité des écritures, et non plus uniquement par sondage.
Les dirigeants d’entreprise peuvent toutefois être proactifs et utiliser ce même fichier pour :
- Analyser la qualité de leur comptabilité, indépendamment de tout contrôle fiscal ;
- Évaluer en amont les zones de risque et corriger les anomalies détectées ;
- Se préparer à remettre un fichier conforme en cas de contrôle, les entreprises devant être en mesure de fournir des FEC sur des exercices clos, mais aussi en cours d’exercice.
En cas de contrôle fiscal, certains points font systématiquement l’objet d’une vérification méticuleuse, et les entreprises doivent donc y porter une attention particulière. Quels sont-ils ?
Conformité générale du Fichier des Écritures Comptables
Le fichier FEC doit respecter des normes très précises : jusqu’à 18 informations peuvent être fournies pour chaque écriture comptable. Sans détailler l’intégralité des champs requis, une attention particulière doit être apportée à certains points :
- Présence de tous les champs : en principe, tous les champs prévus par l'article A47 A-1 sont obligatoires. L’administration prévoit toutefois, dans certains cas précis, des champs « à blanc si non utilisé » notamment quand la donnée n’est pas nativement disponible dans le logiciel comptable.
- Numéros de séquence : la procédure de validation des écritures interdit toute modification ou suppression ultérieure. En principe, une véritable séquence des écritures doit donc se retrouver en comptabilité, seules certaines circonstances précises permettent de justifier des « trous » dans cette séquence (l’utilisation du mode brouillard notamment). Dans tous les cas, les écritures comptables ne doivent en aucun cas être renumérotées car le FEC ne serait alors plus une image fidèle de la comptabilité du contribuable. Une rupture de séquence sera systématiquement repérée par l’administration fiscale, car cela peut être considéré comme une tentative de dissimulation ou de fraude...
- Cohérence des dates : le cahier des charges du FEC prévoit l’enregistrement de la date de la pièce justificative, mais aussi des dates de comptabilisation, de lettrage et de validation. En cas de contrôle fiscal, ces informations permettent au vérificateur de reconstituer une chronologie précise des événements comptables. La mise en place de procédures strictes et leur vérification doivent donc être prévues.
Cohérence des informations comptables avec le système d’information de l’entreprise
Lors de ses vérifications, la DGFiP peut s’appuyer sur certaines informations qui ne relèvent pas directement des comptes annuels :
- Comptabilité analytique ou budgétaire (calcul des provisions, détermination de coûts de production, d'achat, de revient ou de transfert, des marges, etc.) ;
- Gestion commerciale (articles, tarifs, factures, remises, clients, fournisseurs, etc.) ;
- Système de caisses et de recettes ;
- Gestion des stocks ;
- Gestion de production ;
- Gestion du personnel.
Par ailleurs, de nombreux soldes de la liasse fiscale peuvent être reconstitués à partir des données comptables. Il doit exister une concordance entre les déclarations annuelles de l’entreprise, et les soldes obtenus à partir des données du FEC. Tout décalage est susceptible d’attirer l’attention de l’administration.
C’est donc la cohérence d’ensemble du système d’information de l’entreprise avec le Fichier des Écritures Comptables qui doit être vérifiée, le dirigeant devant être en mesure d’expliquer comment ces données sont déversées en comptabilité.
→ Contrôle fiscal : téléchargez notre checklist pour bien se préparer avec le FEC
Contrôle des ventes
L’analyse du FEC permet d’isoler et d’extraire très simplement les factures de vente dont la numérotation n'est pas chronologique et continue. Ce point est particulièrement surveillé car il permet souvent de détecter des fraudes sur le chiffre d’affaires.
Par ailleurs, en rapprochant les données du logiciel de gestion de celles présentes dans le FEC, le vérificateur pourra notamment contrôler :
- L’existence de toutes les factures de vente inscrites en comptabilité dans le logiciel de facturation ;
- La présence de tous les numéros de comptes existants dans le FEC dans ce logiciel de facturation ;
- La concordance entre le cumul de chiffre d'affaires provenant de la gestion commerciale et celui extrait de la comptabilité.
Enfin, l’analyse du lettrage des comptes clients permet de détecter la présence de délais d’encaissement anormaux.
Contrôle de la comptabilisation et de la déclaration de TVA
Grâce au Fichier des Écritures Comptables, l’administration peut très simplement comparer le montant des produits taxables et leur ventilation par taux de TVA à la taxe effectivement comptabilisée. En reconstituant la chronologie de la saisie des écritures, elle peut également détecter des décalages de TVA qui auraient été réalisés en cours d’année. Enfin, l’analyse du lettrage des comptes de tiers permet d’analyser l’encaissement des factures, et donc de contrôler la TVA collectée sur les encaissements.
Analyse des stocks
L’utilisation du data-mining donne la possibilité d’explorer les données comptables concernant les achats et ventes sur une période donnée. Cela permet dans certains cas à l’administration de reconstituer une variation théorique de stock, et donc de valider le stock de fin d’exercice.
Contrôle des immobilisations et des amortissements
Grâce aux fichiers FEC, les brigades de vérification peuvent contrôler très simplement la bonne comptabilisation des immobilisations et de leur amortissement :
- Contrôle de la base amortissable et des taux ;
- En cas d’acquisition en cours d’année, vérification de la date d’inscription en immobilisation et du calcul du prorata (point de départ de l’amortissement).
Analyse de la construction des prix de transfert
L’analyse informatique des données comptables facilite également le calcul des marges et des prix de revient. La DGFiP peut en effet effectuer plus simplement des calculs de marge par client, en s'appuyant notamment sur l'analyse de comptabilité analytique de l'entreprise. Elle est donc capable de décortiquer les calculs des prix de revient des produits de l'entreprise et leur cohérence avec sa politique de prix de transfert, et de déterminer si l’entreprise respecte le principe de pleine concurrence.
Prévenir le risque fiscal grâce à l'Examen de Conformité Fiscale
Plusieurs des sujets évoqués font partie des points contrôlés lors d’un Examen de Conformité Fiscale. Cette prestation, réalisée par un professionnel du chiffre, permet de faire vérifier la comptabilité d'une entreprise à travers un audit préventif. Il vise à renforcer la relation de confiance entre les entreprises et l'Administration fiscale, cette dernière tenant compte de la réalisation d’un ECF lors de la programmation des contrôles fiscaux.
On retrouve notamment parmi les points du chemin d’audit la vérification de la bonne conformité du FEC et de sa qualité comptable au regard des normes et principes comptables, le respect des règles d’exigibilité en matière de TVA collectée et déductible ou encore le respect des règles de détermination des amortissements et leur traitement fiscal.
Depuis l’instauration du FEC en 2014, les vérificateurs ont accès à la totalité des données comptables de l’entreprise. Les outils développés par les informaticiens de la DGFiP leur permettent de procéder à des contrôles de plus en plus poussés. C’est pourquoi il est important pour les entreprises de contrôler régulièrement la qualité de la comptabilité, notamment pour prévenir le risque fiscal sans attendre la réception d’un avis de vérification.
Confier un Examen de Conformité Fiscale à son expert-comptable est également un excellent moyen de se prémunir des risques liés à un contrôle fiscal : une entreprise se soumettant à l’exercice est en effet exonérée des pénalités et intérêts de retard liés aux point validés.
A propos de l'auteur
Co-fondateur
Diplômé de l’Ecole des Mines Télécom de Nantes, Franck est co-dirigeant de Runview depuis 2006. Son domaine d'expertise : stratégie produits et développement des logiciels et des algorithmes par l'équipe R&D. Il co-définit également les orientations stratégiques de ComptaSecure.
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