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Le commissariat aux comptes à l’heure de la digitalisation

Rédigé par Manon Mougin | 15 juin 2021

Parce qu’ils exercent dans un univers toujours plus dématérialisé et qu’ils disposent, à l’instar du FEC, de certaines sources de données standardisées, les commissaires aux comptes font évoluer leurs pratiques. De nouveaux outils leur permettent en effet d’exploiter ces informations. Pour ces professionnels, l’enjeu n’est pas seulement de s’adapter à la digitalisation de l’économie mais bien d’apporter des réponses aux nouveaux besoins des entreprises, notamment des PME.

Relèvement des seuils de l’audit légal, création d’une mission d’examen de conformité fiscale… le cadre réglementaire du commissariat aux comptes a récemment connu d’importantes réformes. Au-delà de ces évolutions, la numérisation accélérée de l’économie transforme elle aussi la profession. « Nous sommes de plus en plus dans le numérique, avec des flux d’informations invisibles. Le commissaire aux comptes doit adapter ses techniques de contrôle à cet environnement », rappelle Nathalie Malicet, présidente de la commission Numérique et Innovation de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes (CNCC). Digitalisation des cabinets, solutions techniques et perspectives d’avenir, elle livre son éclairage sur les évolutions en cours.

 

Outils, stratégie, RH… la digitalisation du commissariat aux comptes

Même si la maturité numérique des cabinets varie, les commissaires aux comptes (CAC) ont engagé leur digitalisation depuis longtemps. « Ils ont une grande appétence pour tous les outils qui peuvent faciliter l’exercice de la profession, tant pour la gestion interne des mandats que dans l’exercice des contrôles chez les clients », souligne Nathalie Malicet.

Aux côtés des solutions du marché, ils bénéficient de ressources développées par la CNCC, à l’instar de SmartFEC, un add-on Excel d’analyse du FEC lancé en 2016 ou de cyberAUDIT, qui mesure l’exposition d’une entité au risque cyber et en évalue les conséquences financières. L’amélioration d’outils existants et la création de nouveaux logiciels sont également à l’étude.

« Nous cherchons à montrer le chemin aux confrères. Ils font déjà de l’audit dans un univers numérique, il faut aller plus loin », estime Nathalie Malicet. Une adaptation qui, pour la spécialiste, ne passe pas uniquement par un changement d’outils mais suppose une réflexion stratégique sur les besoins futurs des entreprises et une évolution dans les ressources humaines des cabinets. « Demain, nos collaborateurs devront être des contrôleurs de data », prévoit-elle.

 

Le FEC, un levier de transformation déjà bien intégré par les cabinets

Le Fichier des Ecritures Comptables a été largement adopté par les CAC, conscients de l’intérêt d’exploiter ce fichier normé et obligatoire. « Grâce à tous les outils d’analyse qui existent sur le marché, une grande partie des commissaires aux comptes utilisent le FEC », estime Nathalie Malicet.

Pour déterminer le plan d’audit, mener à bien les cycles de travail, effectuer des recherches sur des éléments qui semblent anormaux… « le FEC peut être utilisé du tout début et jusqu’à la fin de la mission », assure-t-elle. Il pourrait aussi servir à calculer des indicateurs de gestion, dans le cadre de compléments de mission. « Comme tout fichier normé, le FEC présente des réservoirs de missions pour le commissaire aux comptes, notamment pour accompagner les PME », confirme Nathalie Malicet.

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Dans le contexte post-loi Pacte, convaincre ces entreprises et répondre à leurs besoins est un enjeu majeur pour la profession. La nouvelle mission d’examen de conformité fiscale pourrait y contribuer, même si « elle n’est pas réservée aux commissaires aux comptes », rappelle la spécialiste convaincue que si cette mission s’appuie sur l’analyse du FEC, elle ne peut s’en contenter. « Cela ne représente qu’une partie des dix points d’audit prévus », explique-t-elle.

 

Des mutations à venir

D’autres évolutions sont à prévoir pour la profession, dont le travail de certification pourrait de plus en plus porter sur des données extra-financières, notamment en matière de responsabilité sociétale des entreprises. La standardisation des données sera décisive dans la poursuite de la digitalisation de l’audit. « Il faudrait pouvoir réfléchir avec les pouvoirs publics, pour déterminer une sorte d’export universel, sur le modèle du FEC avec les écritures comptables, pour d’autres sources d’informations », espère Nathalie Malicet.

A plus long terme, le développement technologique pourrait également modifier le champ temporel du commissariat aux comptes en l’orientant vers un audit en temps réel. L’hypothèse de la création d’un commissaire aux algorithmes, pour certifier la transparence et la fiabilité de ces derniers, fait aussi réfléchir la profession. Une autre manière d’incarner le rôle de garant de la confiance entre acteurs économiques que le commissariat aux comptes ne cesse de réinventer.